Chronique de Plouha (1914-1918)

De Les Côtes-d'Armor dans la Grande Guerre

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Événements auquels j'ai assisté pendant la guerre.

Départ des mobilisés des nouvelles classes.

Arrivée des réfugiés en septembre 1914.

Envoi de vieux linge pour la Croix-Rouge à la Mairie
Envoi de couvertures, de lits, de draps à l'hôpital temporaire.

Réquisitions diverses à la Mairie.

Vente de chevaux pour l'armée sur la place.

Conseils de révision : Les conscrits défilent dans les rues en chantant.

Récolte de l'or : Plusieurs paysans résistent et gardent leur or; les autres l'échangent, non sans crainte, contre du papier.

Services funèbres des soldats ou marins morts au Champ d'honneur.
En 1916, les élèves des écoles assistent à celui de M. BOISHARDY, instituteur, mort à Verdun le 5 juin 1916.

Arrivée de réfugiés en 1917 (Région de Lille).
Le Maire de Plouha reçoit les réfugiés à la gare; il les conduit dans un local très vaste "l'Usine de la Brosserie" où un déjeuner leur a été préparé. Avec leur paquet sous le bras, ils font peine à voir. Une vieille femme surtout est l'objet de la pitié générale : elle a le corps replié en deux à la base du tronc et donne l'idée des tortures qu'elle a subies. Deux jeunes garçons de 15 et 17 ans font partie du cortège; ils sont devenus fous par suite des mauvais traitements qu'ils ont dû supporter depuis 4 ans. Enfin, pour ne citer que les principales misères, une mère de 6 enfants, dont le mari était prisonnier, a vécu aussi 4 années à Lille depuis l'occupation allemande; elle n'y avait comme nourriture que de l'eau de chicorée et des betteraves; elle nous montre son dernier-né, un enfant de trois ans environ, qui porte aux articulations des traces de tuberculose telles que je n'en avais jamais vues. Le pauvre petit a été malade à la suite des "bons morceaux" qu'il a mangés à Paris en passant. La mère a le visage anémié, les yeux enfoncés et le regard triste.

Les enfants des écoles apportent en toute hâte le jour même de l'arrivée de ces réfugiés et les jours suivants tout ce qu'ils possèdent à la maison de chaussures, vêtements, jouets, friandises pour ces pauvres infortunés qui sont au nombre de cent.

Arrivée du sucre

Distribution du pain en août 1918.
Du 10 au 25 août, j'ai assisté à la distribution d'un pain noir que la boulangère coupait en morceaux de 3 ou 4 hectos en sortant du four, entre les personnes qui avaient assailli sa maison depuis plus d'une heure pour pouvoir se procurer ce morceau de pain lourd, noir et immangeable que même les bêtes elles-mêmes ne voulaient pas.

Heure du courrier (10h du matin).

Chaque jour, depuis la guerre, des attroupements se forment à la porte du bureau de poste, on y commente les faits du jour, le communiqué en mains. Lorsque les facteurs sortent du bureau, on se précipite autour d'eux, ils distribuent à un habitant de chaque village qui les demandes, les lettres de tout son quartier.

Travaux des champs.
En septembre 1914, j'ai participé au sarclage d'un champ de betteraves, qui menaçaient d'être étouffées par les mauvaises herbes, chez la femme d'un mobilisé disparu à Langemarck. Elle n'avait pas encore pris possession de sa ferme et son mari, mobilisé dès le premier jour, était venu quelques semaines auparavant y planter les betteraves; restant seule et habitant à une distance éloignée de sa future demeure, elle avait dû laisser ce champ à l'abandon. Sitôt les mauvaises herbes enlevées, les plants devinrent vigoureux et donnèrent des betteraves énormes.

En août 1915, 1916,1917,1918, 1919, il m'a été donné également de participer à la moisson : mise en gerbes, cuisine un jour de battage, garde des enfants, etc.

Envoi de colis pour l'Arbre de Noël des réfugiés.
Avis de réception de ces colis, lettres d'enfants.

Armistice - Fête de la signature. Sonneries de cloches, chants nationaux répétés en chœur dans les rues. Bal organisé dans le local qui deux années auparavant avait servi de pied-à-terre aux Réfugiés de Lille.

Arrivée des prisonniers. (Décembre 1918 - janvier 1919)
Peu de bagages, une caisse en bois en guise de valise. Par un heureux hasard, ceux que j'ai vus n'ont pas trop souffert pendant leur longue captivité; la joie rayonne sur leur front vieilli lorsque plus heureux que beaucoup d'autres, ils revoient le sol natal...

Pas de signature

Sources


--Jylaigre (discussion) 22 juin 2014 à 10:50 (CEST)

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